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Semaine arrageoise (La)

La Semaine arrageoise. Journal de renseignements et d’annonces

La Semaine arrageoise n'a guère de prétention éditoriale. Son ambition est ailleurs. De belle facture, cet hebdomadaire ne revendique que la qualité de « journal de renseignements et d'annonces ».
De format 23 x 28 cm, présentée sur trois colonnes, La Semaine arrageoise semble en effet tout entière dédiée à la mise en valeur du savoir-faire de la société Georges Boyau, le successeur de Brissy. Chaque numéro vante, l’un, l'Imprimerie typographique et lithographique, l’autre, l'atelier de reliure « le plus important et le mieux outillé de la région », etc. Bicyclettes, tricycles Julien et Désiré Delansorne, automobiles Peugeot ou La Française, chaque encart publicitaire, avec ses caractères fantaisie et son dessin, est un petit chef-d'œuvre d'art graphique, témoignage du talent du propriétaire de La Semaine arrageoise. La simple présentation de spécimens de cartes de visite, étalés sur les deux pages centrales, vaut tous les qualificatifs louangeurs… Boyau avoue son ambition : « donner aux annonces un cachet absolument artistique ». En 1901, il en fait la démonstration en présentant durant plusieurs mois des exemples d'annonces particulièrement travaillées. Et qu'on se le dise « toute commande d'imprimés de l'importance de 100 F donne droit à l'insertion gratuite d'une demi-page dans La Semaine arrageoise, de 50 F à un quart de page. »

SUSPENDUE POUR CAUSE DE TRAVAIL
C'est que la concurrence semble implacable entre les imprimeurs arrageois. Dans son hebdomadaire, Boyau informe ses lecteurs de toutes les chausse-trappes tendues par ses confrères : fausse information sur son activité, débauchage d'ouvriers, etc. Pour Boyau, la publication de La Semaine arrageoise n'est qu'une activité annexe qu'il n'hésite pas à interrompre quand le travail de labeur est trop important. Ainsi justifie-t-il la non-parution de l'hebdomadaire du 17 décembre 1899 au 14 janvier 1900 : « Nous reprenons aujourd'hui la publication régulière de La Semaine arrageoise que nous avons dû suspendre ces dernières semaines pour faire face à l'extraordinaire quantité de cartes de visite que nous avons eue à faire grâce à notre réclame soutenue et aux spécimens de luxe que nous n'avons cessé de mettre sous les yeux du public. » Le journal interrompra sa parution à plusieurs reprises notamment du 11 mars 1900 au 26 mai 1901.
Boyau a d'ailleurs ciblé son public. La Semaine arrageoise est d'abord distribuée gratuitement tous les samedis à 1000 exemplaires. À partir de 1900, elle reste gratuite pour les commerçants et les cabaretiers de la ville. Par contre, pour les particuliers, l'abonnement est fixé à 1 F par an pour la ville, 1,50 F pour le dehors. « Ce prix d'abonnement, s'empresse de préciser l'éditeur, a pour but de couvrir les frais de port. »
Boyau insère gratuitement tous les communiqués que voudront bien lui faire parvenir les sociétés arrageoises, tout comme les offres et les demandes d'emploi. Les frais rédactionnels sont limités. L'hebdomadaire publie l’état civil, le marché d'Arras, les départs et les arrivées des trains des Chemins de fer du Nord, les levées de la poste. Dans « la petite chronique », toutes les sociétés : les pêcheurs de Béthune, les joueurs de Javelots, les membres de la Société communale de secours, etc. annoncent leurs manifestations. Dès le lancement, le sport vélocipédique occupe une place particulière. Les annonceurs les plus fidèles sont les cycles Gladiator, Julien et Désiré Delansorne.

SANS CONTENU
Certains événements ont le droit à un traitement particulier. Le 27 août 1899, La Semaine arrageoise annonce longuement le retour, à l'occasion des fêtes d'Arras, du cinématographe Lumière de Lyon « qui a remporté l'an dernier, aux Allées, un énorme succès ». « Par la suite d'un agrandissement considérable de l'établissement, écrit-elle, il est placé aujourd'hui en face de l'abreuvoir, près de la statue de Crespel. Il n'y a pas que la carcasse de l'établissement qui est changée, mais encore l'appareil cinématographique et la collection de vues et scènes animées. Des vues de l'an dernier, il ne reste que le pèlerinage à Notre-Dame de Lourdes dont le succès fut grand. Quant à l'appareil, il est du dernier perfectionnement du modèle 1899 (mars) et se nomme le biographe. Pourquoi ce nouveau nom ? Simplement pour ne laisser aucune confusion entre l'appareil primitif et celui du dernier modèle. » Le 8 octobre 1899, c'est sur un événement moins léger qu'il s'arrête : la mort du maire d'Arras Legrelle.
La Semaine arrageoise n'a pas de politique rédactionnelle. Au gré de la place que lui laisse la publicité, elle évoque certains faits divers, donne le compte rendu des audiences du tribunal correctionnel. À partir de 1900, Eugène Grilhot y tient une chronique financière. Quelques articles sont signés d'initiales : A-V, FF, ZB, EL, AA qui ne permettent pas d'identifier les rédacteurs.
Arguments de promotion ? La Semaine arrageoise change de format à deux reprises. Ce qui suscite des commentaires peu amènes de certains imprimeurs : « Plus il devient grand, plus il est petit ». L'hebdomadaire est surtout imprimé sur du papier de couleurs différentes : passant du vert, au rose, au marron.
Le dernier numéro de La Semaine arrageoise semble dater du 13 avril 1902. La semaine précédente, l'hebdomadaire offrait encore à ses lecteurs, sur une double page, la façade et le plan de l'imprimerie Boyau. La dernière occasion de promouvoir son savoir-faire ?