AVENIR D’AUCHEL (L’)
L’Avenir d’Auchel. Journal hebdomadaire d’Auchel de sa région, paraissant chaque samedi
L'imprimeur béthunois Célestin Basin n'est propriétaire de L'Avenir de l’Artois et de L'Avenir de Lens que depuis quelques semaines lorsque, le 5 mars 1922, il lance L'Avenir d'Auchel. La formule de cet hebdomadaire paraissant le dimanche n'a rien d'original et doit beaucoup à ses deux prédécesseurs : quatre pages de format 44 x 60 cm, présentées sur six colonnes, le même prix, le même gérant, J. Dhélin, des rubriques partagées et de nombreux collaborateurs communs à commencer par son rédacteur en chef.
Diffusé à Auchel, Marles, Allouagne, Burbure, Lozinghem, Cauchy-à-la-Tour, Lapugnoy, Calonne-Ricouart, Camblaon-Chatelain, ce journal qui ne prétend pas concurrencer les grands quotidiens sur le terrain des nouvelles du monde ou celui des événements nationaux, a l'intention de combler leur carence sur les questions locales. Ce partisan résolu de l'ordre affirme en guise de profession de foi : « Nous veillerons à ce que les promesses des élus soient tenues, nous signalerons sans parti pris aux municipalités ce que nous croirons de voir assurer le bien-être des populations
Nous soutiendrons de toute notre énergie les hommes de bonne volonté, mais nous n'hésiterons pas à fustiger les turbulents, les flagorneurs, les profiteurs. »
EN TERRE DE MISSION
L'information locale occupe une bonne part des colonnes du journal qui est là aussi en terre de mission au sein d'un territoire largement acquis à la gauche. A partir d'avril 1922, cette rubrique locale s'ouvre par un dessin assez naïf rappelant la vocation industrielle d'Auchel : chevalet de mine, cheminée d'usine, etc. Quelques mois plus tard, ce dessin passe même en « une » où l'information locale prend ses aises. Dès 1923, les nouvelles auchelloises qui font la manchette peuvent être illustrées : l'érection d'un monument à la mémoire d'un ancien directeur d'école libre, les récipiendaires de noces d'or, la reine du travail de Marles-les-Mines, un vétéran des sapeurs-pompiers récemment décoré, etc. En 1928, chaque semaine, les lecteurs retrouvent un croquis d'une personnalité locale. La chronique sportive, souvent conséquente, peut également faire l'ouverture du journal. Le 30 juin 1930, la VIIIe fête fédérale de l'union des sociétés d'éducation physique occupe toute la première page avec un compte rendu de Célestin Basin, lui-même. Le 1er juillet 1939, le journal paraît en couleur pour la fête du travail des mines de Marles. L'Avenir d'Auchel ne manque pas d'attraits… même s'il ne se dote d'un feuilleton, Le Chêne de la peur de Claude Montorge, qu'à partir du 16 mars 1924.
« Victoire ! », Trois mois après son lancement, l'hebdomadaire exulte. Dans l'élection cantonale du 21 mai, le républicain Decroix vient de battre le socialiste Lelong et le communiste Paveau. « Nous sommes fiers d'avoir dans ce journal pris une part active dans la bataille et saluons avec bonheur l'élu » écrit l'éditorialiste qui en profite pour demander la démission de la municipalité communiste d'Auchel. « Mise en minorité, poursuit-il décemment elle ne peut persister à remplir sa fonction alors que les électeurs lui ont retiré sa confiance. »
Lors des municipales qui suivent en 1925, L'Avenir apporte son soutien à la liste d'Union républicaine emmenée par l'ancien maire Charles Dupont qui est battu par la liste socialiste et syndicaliste. La même année, dans les cantonales qui suivent, son candidat, le docteur Lafaye, s'incline devant le socialiste Havenne.
BOYCOTTÉ PAR LA MUNICIPALITÉ
Dans ces conditions, les relations entre l'hebdomadaire et la municipalité sont plutôt mauvaises. Dans le journal des mineurs, La Tribune, Havenne accuse L'Avenir « d'être subventionné par la Compagnie des mines de Marles », d'être « vendu pour faire de la besogne anti-ouvrière » Célestin Basin signe lui-même une mise au point. La polémique se poursuit ainsi jusqu'en décembre. Une nouvelle fois, le rédacteur Marcel Osteux répond à Havenne. Cette polémique n'empêche pas le secrétaire du syndicat des mineurs d'intervenir régulièrement dans une tribune libre.
En 1928, après avoir refusé de passer un texte d'un adjoint, L'Avenir d'Auchel se voit priver de toute information officielle. Qu'importe, la semaine suivante, le journal triomphe : « Rien ne manquait à notre chronique locale, nos lecteurs ont constaté que nous ne pêchions pas par présomption en leur annonçant qu'ils ne perdraient rien, malgré le boycottage municipal
La municipalité, elle, est éberluée, elle n'en revient pas que nous ayons su tout ce que nous voulions, sans elle…, malgré elle ! » Et d'en profiter de faire rire une nouvelle fois aux dépens de l'adjoint.
L'Avenir ne semble guère peser sur les choix politiques des électeurs, pourtant son audience n'est pas négligeable. Signe de cette bonne santé, son propriétaire multiplie les éditions : deux à partir de 1927, puis trois à partir du 12 janvier 1930, celle de Calonne, ville de 13 000 habitants, aussi peuplée qu'Auchel. Les signes de prospérité ne manquent pas. La publicité est abondante à travers les six pages du journal. Le 9 novembre 1930, L'Avenir quitte la rue du Temple où il est installé depuis sa fondation. Il entre dans de nouveaux locaux, Grand'Place. Dans son édition suivante, il en propose, photo à l'appui, une longue description : « Notre hall se présente en effet comme un grand illustré dont toutes les chroniques sont largement alimentées par des photographies d'un réalisme saisissant et d'une netteté parfaite.
Nous avons voulu que les familles trouvent les sujets intéressants pour chacun de leurs membres.
C'est ainsi que les enfants par de délicieuses scènes fantaisistes, y puisent de saines et instructives distractions.
Le père, à côté des vedettes politiques de France et d'Europe, a le plaisir d'admirer les inventions de nos contemporains. Nous avons voulu que les arts aient une grande place dans cette exposition permanente : les vues de monuments, de magnifiques panoramas, des reproductions de chefs-d'œuvre issues de l'ingéniosité humaine sont de nature a inspirer nos artisans dont beaucoup collaborent au maintien de la réputation artistique de notre pays.
Les jeunes découvrent les as spécialisés dans tous les sports, se tiennent au courant de leurs performances et apprennent ainsi à acquérir de la vigueur par une pratique rationnelle d'exercices exigeant de la volonté et aidant ainsi à réaliser la maxime : une âme saine dans un corps sain.
Maman et jeunes filles ont la satisfaction de suivre la mode au jour le jour grâce aux toutes dernières créations des plus célèbres couturiers, modistes, fourreurs et bottiers.
Les progrès de la science en toutes ses branches sont relevés au fur et à mesure des découvertes profitables à l'humanité qu'il s'agisse de médecine ou de machinisme. »
UNE ÉDITION DE L'AVENIR DE L'ARTOIS
Célestin Basin préside bien sûr à l'inauguration de ce nouveau hall ouvert désormais toute la journée, et où il tient une permanence tous les mardis de 11 à 12 heures. Pour l'événement, il est notamment accompagné de J. Vansteene, « correspondant » local depuis le lancement du titre. Du reste de la rédaction, le journal ne donne pas d'autres précisions. En mars 1922, il écrivait simplement : « l'administration et la rédaction se composent d'anciens poilus ». Ce qui vaut aussi bien pour L'Avenir d'Auchel que pour L'Avenir de l'Artois ou de Lens. Parmi les rares signatures apparaissant en rubrique locale, on trouve notamment de celle d'un certain Fernand Buche. Quant à la chronique « Au hasard de la promenade » adaptée à Auchel, elle est signée des pseudonymes Jean Furet puis Jean Voitout.
Suivant l'évolution technique de ses confrères imprimés chez Basin, L'Avenir d'Auchel adopte le petit format avec une présentation sur cinq colonnes. Lors de la déclaration de guerre et dans les semaines qui suivent, la « une » est commune à tous les titres du groupe, puis elle est partagée entre les communiqués officiels et les nouvelles locales. L'Avenir d'Auchel cesse sa parution 12 mai 1940, il ne retrouve ses lecteurs que le 11 février 1945. Quelque vingt ans plus tard, après être devenu la propriété de Léonce Déprez, il est fondu dans L'Avenir d'Artois.